Reinhold Messner est un alpiniste italien de langue allemande, né le 17 septembre 1944 à Bressanone, dans le Tyrol du Sud. Il est considéré comme l’un des plus grands himalayistes du XXe siècle, et le premier à avoir réalisé deux exploits majeurs : l’ascension de l’Everest sans oxygène et la conquête des 14 sommets de plus de 8 000 mètres.
Un pionnier du style alpin
Messner commence à grimper dès son enfance dans les Alpes, notamment dans les Dolomites. Il se fait remarquer par ses ascensions difficiles et audacieuses, comme la face nord des Grandes Jorasses en 1966 ou la face nord-est de l’Eiger en 19682. Il est inspiré par les exploits de Hermann Buhl et de Walter Bonatti, et se forge une éthique de l’alpinisme basée sur le respect de la nature, la légèreté et l’autonomie.
Il applique ces principes dans l’Himalaya, où il se rend pour la première fois en 1970, avec son frère Günther. Ils réussissent la première ascension du Nanga Parbat, mais au prix d’une descente dramatique, où Günther perd la vie dans une avalanche. Ce drame marque profondément Messner, qui en tirera une force mentale exceptionnelle.
En 1975, il réalise avec l’Autrichien Peter Habeler la première ascension du Gasherbrum I en style alpin, c’est-à-dire sans porteurs, sans camps et sans oxygène. C’est une révolution dans l’Himalaya, où le style expédition, avec une logistique lourde et des cordes fixes, est la norme.
L’Everest sans oxygène et en solitaire
En 1978, Messner et Habeler accomplissent l’impensable : ils grimpent l’Everest sans oxygène, alors que beaucoup doutaient de la faisabilité d’une telle entreprise. Ils bénéficient de la logistique d’une expédition allemande jusqu’au col Sud, mais ils atteignent le sommet en autonomie, sans assistance ni radio2. C’est un exploit monumental, qui repousse les limites de l’endurance humaine.
Trois mois plus tard, Messner réalise un autre exploit, encore plus incroyable : il gravit le Nanga Parbat en solitaire, sans autre soutien que sa compagne restée au camp de base. C’est la première fois qu’un 8 000 est gravi en solo, et Messner choisit en plus une nouvelle voie, très difficile, sur la face sud-ouest. C’est une performance inégalée, qui témoigne de son audace et de sa maîtrise technique.
En 1980, il retourne à l’Everest, qu’il gravit à nouveau sans oxygène, mais cette fois en solitaire. Il profite d’une fenêtre météo pendant la mousson, et part du côté tibétain, par la face nord. Il atteint le sommet le 20 août, après avoir passé une nuit sans tente à 8 200 mètres. Il redescend par le même itinéraire, sans rencontrer personne. C’est la première ascension solitaire de l’Everest, et la première traversée intégrale d’un 8 000.
La quête des 14 sommets
Après ces exploits, Messner se lance dans un nouveau défi : gravir tous les sommets de plus de 8 000 mètres de la planète. Il en a déjà cinq à son actif : le Nanga Parbat, le Manaslu, le Gasherbrum I, l’Everest et le K2. Il lui en reste neuf à conquérir.
Il enchaîne les ascensions, en privilégiant le style alpin, le solo ou la cordée réduite, et en évitant l’oxygène. Il ouvre de nouvelles voies, comme la face sud du Dhaulagiri en 1981, la face nord du Kangchenjunga en 1982, ou la face sud-ouest du Makalu en 1986. Il réalise aussi des traversées, comme celle du Gasherbrum I et du Gasherbrum II en 1984, ou celle du Cho Oyu et du Shishapangma en 1985.
Le 16 octobre 1986, il atteint le sommet du Lhotse, son quatorzième et dernier 8 000. Il devient ainsi le premier homme à avoir gravi tous les sommets de plus de 8 000 mètres, sans oxygène et sans répéter de voie. Il devance de peu le Polonais Jerzy Kukuczka, qui achèvera son propre projet en 1987.
Un aventurier aux multiples facettes
Après avoir réalisé son rêve des 14 sommets, Messner ne s’arrête pas pour autant de voyager et de se lancer des défis. Il se consacre pendant vingt ans à la randonnée pédestre, traversant de grandes zones désertiques, comme le Sahara, le Gobi, le Taklamakan ou l’Antarctique. Il est le premier à traverser ce dernier continent à pied, sans traction animale ou mécanique, en passant par le pôle Sud, avec l’Allemand Arved Fuchs, en 1990