Le 9 novembre 1989, un événement inattendu et historique se produit à Berlin : le mur qui sépare la ville en deux depuis 28 ans s’ouvre, laissant passer des milliers d’Allemands de l’Est vers l’Ouest. Cette ouverture symbolise la fin de la guerre froide entre les blocs communiste et capitaliste, et annonce la réunification de l’Allemagne et la chute des régimes communistes en Europe de l’Est.

Le contexte de la construction du mur

Le mur de Berlin est le résultat de la division de l’Allemagne et de sa capitale à la fin de la Seconde Guerre mondiale. En 1945, les vainqueurs du nazisme, les États-Unis, l’Union soviétique, la Grande-Bretagne et la France, se partagent le territoire allemand en quatre zones d’occupation. Berlin, située en zone soviétique, est également divisée en quatre secteurs. Les trois secteurs occidentaux forment Berlin-Ouest, une enclave capitaliste au milieu de la République démocratique allemande (RDA), le régime communiste soutenu par Moscou. Berlin-Est devient la capitale de la RDA.

Dès le début de la guerre froide, Berlin devient un lieu de tension et de confrontation entre les deux blocs. En 1948-1949, les Soviétiques tentent d’isoler Berlin-Ouest en bloquant les accès routiers et ferroviaires. Les Occidentaux réagissent en organisant un pont aérien pour ravitailler la population. En 1958, le dirigeant soviétique Khrouchtchev propose de faire de Berlin-Ouest une ville libre et neutre, mais les Occidentaux refusent. La situation se dégrade encore avec la crise des missiles de Cuba en 1962, qui fait craindre une guerre nucléaire.

Par ailleurs, Berlin devient un point de fuite pour les habitants de la RDA, qui cherchent à échapper au régime autoritaire et à la misère économique. Entre 1949 et 1961, près de 3 millions de personnes passent à l’Ouest par Berlin. Pour mettre fin à cette hémorragie, les autorités est-allemandes décident de construire un mur qui coupe la ville en deux. Dans la nuit du 12 au 13 août 1961, des barbelés et des blocs de béton sont installés le long de la frontière entre les deux Berlin. Le mur s’étend sur 155 kilomètres, dont 43 à l’intérieur de la ville. Il est surveillé par des gardes armés, des miradors, des chiens et des mines. Plus de 300 points de passage sont fermés, ne laissant que quelques-uns ouverts, comme le célèbre Checkpoint Charlie. Le mur de Berlin devient le symbole du “rideau de fer” qui sépare l’Europe en deux.

Les causes de la chute du mur

La chute du mur de Berlin est le fruit d’un processus de changement qui touche l’Europe de l’Est à la fin des années 1980. Ce processus est favorisé par la politique de réforme et d’ouverture menée par le dirigeant soviétique Gorbatchev, qui renonce à intervenir militairement pour soutenir les régimes communistes. Ainsi, en Pologne, le syndicat Solidarność obtient des élections libres en 1989, qui portent au pouvoir le leader de l’opposition Lech Wałęsa. En Hongrie, le gouvernement autorise l’ouverture de la frontière avec l’Autriche, ce qui permet à des milliers d’Allemands de l’Est de fuir vers l’Ouest. En Tchécoslovaquie, la “révolution de velours” renverse le régime communiste sans violence.

En RDA, la contestation populaire s’amplifie à partir de l’été 1989. Des manifestations pacifiques ont lieu chaque lundi dans les grandes villes, notamment à Leipzig, où les manifestants scandent “Wir sind das Volk” (“Nous sommes le peuple”). Ils réclament plus de libertés, de démocratie et de droits de l’homme. Le 4 novembre, une manifestation rassemble plus de 500 000 personnes à Berlin-Est. Le 7 novembre, le gouvernement est-allemand démissionne, et Egon Krenz devient le nouveau chef du parti communiste. Il tente de calmer la situation en annonçant des réformes politiques et une ouverture des frontières.

Le 9 novembre, lors d’une conférence de presse, le porte-parole du gouvernement, Günter Schabowski, annonce que les citoyens de la RDA peuvent désormais voyager librement à l’étranger, sans autorisation préalable. Il ajoute, de façon imprécise, que cette mesure est valable “immédiatement, sans délai”. Les médias ouest-allemands diffusent la nouvelle, qui provoque un afflux de Berlinois de l’Est vers les points de passage du mur. Les gardes-frontières, pris de court, ne reçoivent pas d’ordre clair et finissent par laisser passer les foules. Des scènes de joie et d’émotion se déroulent de part et d’autre du mur, où les habitants se retrouvent, s’embrassent, dansent et chantent. Certains commencent à démolir le mur à coups de marteau et de pioche. Le violoncelliste Mstislav Rostropovitch donne un concert improvisé devant un pan du mur.